L’accès à l’eau, source de vie non substituable, est un droit humain, individuel et collectif, fondamental. Ce droit est indissociable d’un devoir : l’eau est un bien commun patrimonial de l’humanité : il est du devoir de chacun de préserver sa qualité et d’en faire une utilisation qui ne compromette pas son renouvellement.
Assurer l’accès à l’eau pour tous et promouvoir une utilisation soutenable des ressources en eau sont de responsabilité collective. Il est du devoir de la société des humains de promouvoir et de mettre en œuvre une gestion de l’eau. cette responsabilité revient aux pouvoirs publics et doit être exercée au plan local (communauté villageoise, ville…), régional, national, international et mondial, par des institutions démocratiques (que ce soit par démocratie directe, participative ou représentative).
La propriété de l’eau et la gestion des services d’eau (distribution et traitement des eaux usées) doivent rester ou redevenir partie intégrante du domaine public.
Les connaissances scientifiques, techniques, financières de gestion accumulées au cours de l’histoire font partie du patrimoine commun d’un pays et de la communauté internationale.
Les services de distribution et d’assainissement ont un coût. Le principe de la gratuité pour l’accès au minimum vital d’eau en qualité et quantité signifie que l’ensemble des coûts encourus pour la distribution de cette quantité et de cette qualité (et de son traitement) est pris en charge par la collectivité. Dés lors, l’eau n’est jamais gratuite même si les prix payés par les utilisateurs (consommateurs domestiques, agriculteurs ou industriels) sont très bas. Les prix bas expriment une volonté de subside de la part des pouvoirs publics en faveur de certaines catégories d’utilisateurs.
L’eau doit contribuer à la solidarité de vie entre communauté, pays, sociétés, sexes et générations.
Toute politique de l’eau implique un haut degré de démocratie au niveau local, national, continental, mondial.
Les dispositifs de la démocratie représentative doivent être renforcés par la création d’assemblées parlementaires au niveau des grands bassins, au niveau des communautés de rivières, ainsi que par la création d’un « parlement mondial de l’eau ».
Nous devons peser dans la gestion de l’eau en France.
Au sein de l’Europe et du monde, la France hérite d’une responsabilité particulière quant à la tournure que prendront les événements. D’une part, parce que le modèle de gestion par bassin versant et par délégation, « à la française », a été retenu comme le modèle à suivre à la conférence de La Haye en 2000 ; d’autre part parce que les plus grandes multinationales de ce secteur sont hexagonales. La Lyonnaise des eaux (SUEZ) et la Compagnie Générale des Eaux (Vivendi Universal) ont tiré d’énormes profits de la gestion de l’eau en France, leur permettant ainsi de bâtir de véritables empires industriels( notamment dans les moyens de communication). On ne peut que s’étonner que la satisfaction d’un besoin essentiel collectif ait pu générer autant de profit.
Nous ne pouvons donc faire l’impasse d’une véritable critique objective de notre système, alors même que celui-ci révèle des dangers majeurs susceptibles d’être exportés.
Un système qui présente des dérives dangereuses et injustifiables.
Des collectivités en état de dépendance.
En 60 ans la part de la population desservie par des délégataires privés est passée de 20% à 80%. Les communes ont peu à peu abdiqué devant la complexité de la gestion, le renforcement des responsabilités des municipalités face à des directives toujours plus sévères sur la qualité de l’assainissement, ou encore l’impossibilité longtemps effective pour les collectivités de faire des provisions pour travaux et faire face aux investissements considérables.
Ce désengagement de la gestion a retiré aux collectivités, en particulier aux petites communes, tout outil d’analyse critique pour la négociation des contrats, et du même coup la possibilité de faire machine arrière.
De plus, depuis l’après-guerre, le nombre de services publics délégués, le plus souvent aux mêmes sociétés privées, s’est multiplié : collecte et traitement des déchets, chauffage et transport urbain, propreté, cantines etc…
Les délégataires, forts de leur puissance financière, jouent souvent les mécènes généreux et financent au travers de fondations ici l’association sportive là un chantier d’insertion, se rendant chaque jour de plus en plus indispensables.
Enfin, le prix de l’eau varie dans des rapports de 1 à 7, parfois au sein d’un même département ; dans ces conditions, on est en droit de se demander ou est l’égalité des usagers. Les prix pratiqués par le secteur privé sont largement supérieur à ceux des régie directe( +25%) :
Des ressources insuffisamment protégées.
L’agriculture, encouragée par la politique productiviste de la PAC, est à l’origine d’une quantité croissante de rejets organiques et chimiques ; les rejets organiques ont encore augmenté de 4% en 1999 et la pollution par les insecticides (comme l’atrazine) rend périodiquement dans de nombreux départements l’eau dangereuse (Gers, Ille et Vilaine), affectant maintenant 47% des points d’eau, 50% des eaux côtières et 20% des eaux souterraines.
Parallèlement les agriculteurs puisent dans les ressources sans aucun contrôle.
Mais ce ne sont pas les seuls. Chez les industriels, on assiste à des pratiques semblables, à l’image d’IBM qui pompe 2.7 millions de m3 d’eau très pure dans les nappes phréatiques pourtant protégées de l’Essonne.
Sans même parler des proliférations des terrains de Golf (un hectare de golf consomme dix fois plus qu’un hectare de maïs irrigué)
Aujourd’hui seulement 65% des eaux sont traitées par les stations d épuration et celles-ci n’éliminent que 70% des impuretés. Le taux de dépollution n’est donc que de 45% ce qui signifie que la société dépollue aujourd’hui moins qu’elle ne pollue. La directive cadre européenne a fixé pour objectif 20 % de dépollution en plus d’ici 2005, c’est dire les efforts qui doivent être entrepris.
Mais plutôt que de s’attaquer en amont à la réduction massive des rejets, à une gestion plus durable de l’agriculture et de l’industrie, les pouvoirs publics, encouragés par les firmes privées qui y voient un marché à prendre, privilégient le recours à des infrastructures lourdes et coûteuses.
L’absence d’un grand débat, impliquant tous les acteurs.
L’examen du projet de loi sur l’eau, examiné en Conseil des Ministres le 27 juin permet de constater la pauvreté du débat.
Or, pour ATTAC, il serait inadmissible qu’une loi de cette importance ne donne pas lieu à un vrai débat sur l’ensemble des problématiques que pose aujourd’hui la gestion de l’eau : accès, qualité, prix, transparence, gestion des ressources, environnement, service public et délégation.
UN débat public, c’est la première exigence d’ATTAC
Reconquérir le service PUBLIC.
Favoriser le retour à la régie directe.
ATTAC se positionne clairement pour favoriser le retour à la régie directe. Bien plus qu’un outil pour favoriser la concurrence, le retour à la régie directe nous semble à ce jour le seul moyen :
· D’intégrer l’ensemble des problématiques liées à l’eau, sur le long terme.
· De favoriser l’implication des habitants.
· D’empêcher que l’argent liée à la gestion de l’eau serve à financer les ambitions privées des entreprises transnationales à l’étranger et dans d’autres secteur.
· De faire en sorte que les problèmes de pollution soient gérés à la source par le contrôle et la limitation des polluants et ne deviennent pas un marché de plus pour ces firmes.
Renforcer la démocratie participative : La gestion de l’eau, quelle soit publique ou privée, ne saurait être pleinement réussie sans la participation active des simples citoyens. Cette dynamique d’implication n’est certes pas facile, et rencontre aussi bien comme obstacles les réticences des maires que le manque d’engouement des habitants. Mais elle est une nécessité qui serait avant tout un énorme progrès. L’outil existe : les Commissions Consultatives Locales.
Nous devons peser pour que celles-ci voient leur importance croître et leur rôle s’affirmer.