Gestion de l'eau privée en France et Prix de l'eau
Eau polluée : une centaine de foyers boycottent en partie leur facture Posté par : Le télégramme de Brest, 3 avril 2002 le : mercredi 10 avril 2002 à 01:00 Une centaine de foyers finistériens ont entrepris de boycotter partiellement leur facture d'eau pour protester contre la politique des pouvoirs publics destinée à lutter contre sa pollution. Il s'agit, selon Roger Abiven, président de l'association "Agir pour l'environnement et le développement durable" et initiateur de l'opération baptisée Nénuphar, de retenir "jusqu'à 30 euros maximum" sur le montant de la facture et de les placer sur un compte bloqué en expliquant, dans une lettre au distributeur, sa motivation. "Cette somme correspond en moyenne à la redevance perçue par l'Agence de l'eau au titre de la pollution pour chaque foyer. La retenir, c'est une manière symbolique mais légitime de faire pression sur les pouvoirs publics pour qu'ils agissent avant qu'il ne soit trop tard", a-t-il expliqué. L'opération, menée en 2000 et 2001, a valu à certains de ses participants d'être "privés d'eau" ou "menacés de coupure d'eau", selon Roger Abiven, qui se dit lui-même "en sursis depuis le 14 novembre 2001".
France - Le marché de l'eau à la veille d'une gigantesque réorganisation
Posté par : Martine Orange, Le Monde, 3 avril 2002 le : mardi 9 avril 2002 à 10:04
Deux des trois groupes français qui dominent ce secteur risquent prochainement de changer de mains, puisque Vivendi Universal souhaite se désengager partiellement de Vivendi Environnement et Bouygues de la Saur. Ces grandes manouvres alarment les collectivités locales.
Le monde de l'eau, en France, retient son souffle. Dans un an, d'une façon ou d'une autre, le paysage risque d'avoir profondément changé : deux des trois grands acteurs du secteur sont sur le marché, prêts à être cédés. Vivendi Environnement, leader du marché français, s'interroge sur son sort depuis que Vivendi Universal, son premier actionnaire a annoncé vouloir passer sous le seuil des 50 %. La Saur, filiale de Bouygues, devrait aussi quitter l'orbite du groupe. Après avoir échoué à trouver un accord avec l'allemand EON, sa maison mère reprend le dossier et souhaite pour sa filiale soit un partenaire industriel, soit une introduction en Bourse d'ici un an. Face aux bouleversements annoncés, toutes les collectivités locales ou presque sont concernées. Depuis des années, elles ont passé des contrats de gestion de quinze ans ou plus - certaines villes, comme Paris, sont gérées depuis près de cent ans par la Générale des eaux, devenue depuis 1998 la branche française pour l'eau de Vivendi Environnement - pour la gestion de leur eau, de leurs déchets ou de leur chauffage. Inquiets, les élus commencent à s'interroger sur la pérennité des engagements pris. "Puis-je continuer à discuter de la renégociation d'un contrat avec Onyx [la filiale déchets de Vivendi Environnement] ?" s'est enquis dernièrement auprès du Monde un élu du Centre, inquiet des changements en cours.
Les interrogations, désormais, ont gagné les plus hautes instances locales. L'Association des maires de France (AMF), dirigé par le RPR Jean-Paul Delevoye, a fait part de ses vives inquiétudes et se dit très vigilante sur l'évolution de l'actionnariat des entreprises de service collectifs. André Santini, maire UDF d'Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) et président du Syndicat des eaux d'Ile-de-France, a été encore plus violent. Premier client de Vivendi Environnement par l'intermédiaire de cet organisme qui représente 144 communes de la région parisienne, il s'est vivement ému des rumeurs de vente de la société. "Ce retrait, qui serait contraire aux engagements répétés pris personnellement par Jean-Marie Messier, ne pourrait être sans conséquence pour les 8 000 maires de France [qui ont passé un contrat de gestion avec Vivendi Environnement]", affirme-t-il. Vivendi Universal minore l'affaire. A entendre le groupe, les calculs politiques pour prendre la présidence des Hauts-de-Seine ne seraient pas absents des prises de position de M. Santini.
Néanmoins, les déclarations de l'élu sonne comme un coup de semonce. En dépit des efforts des groupes pour dépassionner le débat depuis quelques années, la question de l'eau reste très sensible. Sur le sujet, les communes semblent bien décidées à utiliser les droits que leur a donnés la loi pour réviser, voire rompre, leurs contrats de service collectifs en cas de revente. Vivendi Universal sait désormais qu'il risque au moindre faux pas de voir s'effondrer une grande partie du fonds de commerce de sa filiale, s'il la cède à un repreneur qui ne plaît pas. La menace vaut autant pour Bouygues, qui, malgré sa discrétion, risque de se heurter au même refus. L'évolution de ces grands groupes préoccupe tout autant le gouvernement. L'Elysée, Matignon, et le ministère des finances suivent de près le sujet depuis décembre. "Nous ne pouvons pas nous désintéresser de la question. Nous avons trois leaders mondiaux dans ce secteur, ce qui n'est pas si fréquent. Il est important que nous gardions cette prééminence et que nous continuions à défendre le modèle français de gestion de l'eau", explique-t-on à Bercy. Droite comme gauche, chaque camp se demande quelle solution de reprise pourrait émerger. Sans contrevenir au règlement européen ni aux lois sur la concurrence, tous souhaiteraient des candidats de préférence français, afin de rassurer les collectivités locales. "Tout cela ressemble un peu à la quadrature du cercle", constate un observateur. Très discret sur le sujet, Suez, premier groupe mondial de services collectifs, surveille attentivement les changements annoncés dans ce secteur.
Dans un premier temps, les incertitudes le servent auprès des élus. "Suez sera toujours là dans quinze ans, dans vingt ans et aura toujours les mêmes activités", soulignait Gérard Mestrallet, PDG du groupe lors de la présentation de ses résultats. Mais cet argument commercial ne peut avoir qu'un temps. Bloqué par les lois sur la concurrence et les concentrations qui lui interdisent de présenter un schéma de reprise pour l'une des deux autres sociétés françaises, le groupe se demande lui aussi comment la situation va évoluer. L'idée d'être confronté à de grands électriciens européens comme RWE ou EON ne le réjouit guère. Depuis des années, il surveille, tout comme Vivendi Environnement et la Saur, les mouvements de ces deux groupes puissants et riches qui l'inquiètent beaucoup. L'arrivée d'EDF, évoquée par certains, lui plairait sans doute encore moins. Le pire scénario, cependant, pour lui comme pour tout le secteur, serait peut-être qu'aucune solution crédible ne se dégage pour Vivendi Environnement comme pour la Saur. Dans cette hypothèse, le modèle français de l'eau pourrait s'effondrer, faute de suffisamment d'acteurs de taille pour le défendre.
Gestion de l'eau privée en France et Prix de l'eau
Gestion de l'eau - En France, le privé a depuis longtemps pris le pas sur le public
Posté par : Le Monde, 3 avril 2002 le : mardi 9 avril 2002 à 09:53
LA GESTION de l'eau, de compétence communale, est dans les faits majoritairement assurée par des entreprises privées. Aujourd'hui, à peine un quart de la population française dépend d'un réseau de distribution d'eau potable "100 % public", géré en régie. En revanche, la gestion de l'assainissement, dont la privatisation a réellement commencé au début des années 1990, se fait encore majoritairement par ce biais. La distribution de l'eau potable est souvent concédée aux opérateurs privés sous forme d'affermage (l'entreprise exploite et entretient le réseau, mais la collectivité décide et finance les investissements). Depuis les rachats de la branche eau de Saint-Gobain par Bouygues en 1996 et de la SCM par la Lyonnaise en 1990, trois grandes compagnies se partagent le marché : la Générale des eaux (Vivendi Environnement), la Lyonnaise des eaux (Suez) et la Saur (Bouygues). La facture totale annuelle des français s'élève à 10,2 milliards d'euros. Premier opérateur de France et leader mondial, Vivendi Environnement a des contrats avec plus de 8 000 communes, dont Paris, Lille, Marseille, Nice, Toulouse, et emploie près de 115 000 personnes en France. Le groupe, par l'intermédiaire de la Générale des eaux, dessert 26 millions d'habitants et gère l'assainissement de 17 millions de personnes. Vivendi Environnement possède d'autres filiales : Onyx s'occupe du ramassage d'ordures de 21 millions d'habitants et Dalkia gère 55 000 systèmes de chauffage. ÉCARTS DE PRIX Au deuxième rang, la Lyonnaise des eaux emploie 8 300 personnes, dessert 14 millions d'habitants en eau potable et gère l'assainissement de 8 millions de personnes dans 7 500 communes.
Enfin, la Saur gère des contrats de services collectifs dans 7 000 communes, souvent dans des villes moyennes. Ceux-ci représentent 6 millions d'habitants pour l'eau et l'assainissement, et 4 millions pour les déchets. Une étude de l'Institut français de l'environnement (IFEN) de mai 2001 portant sur 5 000 communes notait que le choix d'une gestion privée ou publique entraîne toujours des écarts de prix entre l'affermage et la régie. Cet écart est de 27 % pour la distribution d'eau potable et de 20 % pour l'assainissement, dans les deux cas en faveur de la gestion publique. En 1997, un rapport de la Cour des comptes a mis en cause la gestion locale de l'eau et dénoncé l'augmentation des prix (+ 60 % en sept ans). Le débat sur l'éventuelle renationalisation des réseaux d'eau a cependant perdu de son acuité depuis 1994. L'indignation suscitée par l'affaire Carignon et le scandale de l'attribution des marchés de l'eau à Grenoble avait provoqué de vives réactions. Philippe Seguin avait ainsi déclaré au Monde le 3 novembre 1994 : "On n'échappera pas à un débat sur la nationalisation, au moins partielle, des compagnies d'eau, compte tenu de l'importance qu'elles ont prise dans la vie des collectivités locales et de la suspicion que leur contrat génère." Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le prix de l'eau en France se situe cependant dans la moyenne européenne, inférieur à ceux pratiqués en Allemagne et au Danemark, et supérieur à ceux pratiqués en Europe du Sud.
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L'observatoire des transnationales B.P. 96 13693 Martigues FRANCE