Bulletin n°1 – Juin 2002 de
l’association Eau Secours 31
Editorial :
Première bougie !
Il y a un an (le 17
mai 2001), se tenait, à l’initiative d’Attac, une réunion regroupant
associations, militants, personnes intéressées par le domaine de l’eau. L’un des principaux constats était l’absence d’une association
d’usagers de l’eau à Toulouse. Après plusieurs réunions consacrées à la
rédaction des statuts, au fonctionnement et surtout à la définition des buts
de l’association, l’association a été déclarée au Journal Officiel en juillet
2002. Nous avons
fait d’abord un travail de
communication pour faire connaître Eau-Secours 31: édition d’une plaquette, communiqués
de presse, articles dans Tout Toulouse et Toulouse-Mag,
points info sur les marchés. A cette occasion nous avons pu mesurer à quel
point la population était sensible à la question de l’eau. Nous avons animé
des débats sur l’eau à plusieurs occasions, et nous avons eu des échanges
fructueux avec l’association de Castres qui
mène une lutte exemplaire contre la Lyonnaise des Eaux et la Mairie. |
Et puis nous avons
commencé à travailler sur le plus important: le traité de concession à la CGE
des services de l’eau et de l’assainissement de Toulouse. Travail très
difficile à cause de l’opacité des documents (1), du refus de la municipalité
de permettre à Eau-Secours 31 d’être
membre de la Commission Consultative pour les Services Publics Locaux de
Toulouse. Mais travail indispensable qui va nous conduire à intervenir auprès
de la Chambre régionale des comptes, pour poser un certain nombre de
questions: sur le calcul du prix de l’eau, sur les emprunts, sur les droits
d’entrée versés par la CGE, etc. L’occasion est
propice puisque la Chambre régionale des comptes doit auditer les comptes des
services de l’eau et de l’assainissement à Toulouse en 2002. Voici ce premier
bulletin pour vous informer et renforcer l’association par une diffusion
publique. Nous serons à nouveau sur le marchés de
Saint-Aubin à Toulouse le dimanche 16 juin à partir de 10 h. _____________________ (1) Vivendi et J.
M. Messier sont connus pour leur capacité à jongler avec les chiffres, en
publiant des résultats de gestion (à l’aide de concepts comptables
originaux!) d’une manière qui surprend et déroute les journaux spécialisés. |
Assemblée Générale : 13 juin 2002 à 20h30
Sud Service Public 1, impasse des arènes Toulouse
Ordre
du jour :
- Barrage de Charlas et problème des réserves d’eau
- Travail sur les rapports de la CGE de 1997 à 2000
- Compte rendus du Festival de l’eau et d’Aquarévolte
- Participation au Forum Social du Grand Sud
- Questions diverses
Contact : Siège : CASC 10 bis rue du Colonel Driant 31400 Toulouse Permanence : 2è et 4è jeudi de chaque mois de 17 h à 20h Téléphone : 06.88.68.67.57 Le site : http://eausecours31.free.fr |
Bulletin
d’Adhésion Nom ………………………………………………….. Prénom ……………………………………………… Adresse……………………………………………… tél. - fax -…………………………………………… messagerie :…………………………………………… Membre ACTIF : 8
Euros Soutien : 16 Euros Chèque à l’ordre de « Eau Secours 31 » Adresser à : Eau Secours 31- CASC ,10 bis rue du
Colonel Driant, 31400 Toulouse |
Vivendi
trouble le marché de l’eau
: une nouvelle donne
La Générale des Eaux, devenue VIVENDI,
avait pris le contrôle de HAVAS et de CANAL +, en 1997. Puis ce fut la fusion
avec UNIVERSAL, et la main mise de J.M. Messier et de ses actionnaires, sur six
pôles d'activité: l'environnement, le cinéma et la télévision, l'internet, l'édition, les télécommunications, la musique.
Les difficultés de ce gigantesque mécano
sur les marchés financiers (40% de chute de son action depuis le début de
l'année) ont amené le groupe Vivendi-Universal (VU) à
chercher à vendre une bonne partie de sa filiale Vivendi Environnement:
actionnaire à hauteur de 63% de celle-ci, VU a annoncé, début mars 2002, son
intention de passer sous la barre des 50%.
Ce désengagement, joint à celui annoncé par
Bouygues vis-à-vis de sa filiale, la SAUR, a provoqué remous et réactions chez
les élus des 8000 communes en contrat avec Vivendi pour la gestion de l'eau.
Jean-Paul Delevoye,
élu RPR, président de l'Association des maires de France (AMF), déclare au
Monde du 4 avril 2002 que, face à la vente possible de Vivendi Environnement et
de la Saur, "il ne faudrait pas que le changement d'actionnaire aboutisse
à réduire l'offre concurrentielle sur le marché. Toute modification de
l'actionnariat de ces deux groupes devrait être soumise en préalable à l'AMF.
Il est possible que ces ventes obligeront, en vertu de la loi,
les maires à revoir leur contrat d'affermage. Mais le risque est grand, s'il
n'existe plus que deux opérateurs sur le marché, de ne plus voir les maires en
position de force pour négocier et éviter le renchérissement de la facture
d'eau (...). L'AMF, via son cabinet d'expertise Service Public 2000, donnera un
avis qui informera les maires de la qualité des prestations offertes par les
nouveaux opérateurs. Le passage par un concessionnaire doit rester une
possibilité et non une obligation. Les maires peuvent choisir de passer en
régie, pour gérer eux-mêmes, sans intermédiaire, le service de l'eau."
Dans ce nouveau contexte, il importe que
EAU-SECOURS 31 analyse la situation sur Toulouse et l'agglomération. Un nouveau
rapport de forces peut s'établir pour remettre en question la gestion déléguée,
et pour obtenir le retour à une régie directe de l'eau et de l'assainissement.
Brèves : Au fil de l’eau
...
Du plomb dans
les tuyaux (1) Un cabinet de syndic de la région parisienne vient de faire
réaliser des tests dans 102 immeubles anciens équipés de tuyaux en plomb.
Dans la majorité des cas, la qualité de l'eau n'est pas aux normes
européennes qui seront applicables en janvier 2003. Compte tenu de
l'importance de l'échantillon, on peut légitimement penser que la situation
est globalement la même au plan national. Rappelons que le seuil fixé par la
directive européenne est de 25 micro grammes par
litre, première étape avant les 10 micg/l à l'horizon 2013. La CGE se prépare à commercialiser un filtre adaptable aux
robinets pour éliminer le plomb, d'une capacité de filtrage de 1000 litres,
soit 5 c d'euro le litre traité. A signaler que l'industriel allemand Brita a
mis au point des carafes de filtrage, dont les ventes françaises ont doublé
de 1998 à 2001 (Libération 23/03/02). Du plomb dans
les tuyaux (2) A Toulouse, un plan de renouvellement des branchements menant
des grosses conduites d'eau (sans plomb) aux domiciles des particuliers a été
lancé il y a quelques années. Mais il reste 36 000 branchements à traiter,
soit à peu près 180 km de tuyaux, en estimant à 5 mètres chaque branchement.
Le budget est estimé à 450 MF pour une opération qui devrait s'achever en
2009/2010 (La Dépêche 19/09/01). A signaler que des particuliers ayant fait analyser la teneur
en plomb de leur eau, ont obtenu une intervention immédiate de la CGE pour
changer les canalisations. Qu'on se le dise ! |
132 habitants
font plier la CGE Le 3 mai, le TGI de Metz a débouté la CGE qui avait assigné
132 habitants de Malancourt-la-Montagne (Moselle)
pour le non-paiement d'une surtaxe d'assainissement. Instaurée en 1990,
facturée depuis 1996, cette surtaxe de 0,20 euro/m3 devait servir à
l'amélioration de la station d'épuration. Considérant qu'il n'y avait pas
d'amélioration, la plupart des villageois refusent de s'acquitter de la
surtaxe à partir de 1998. Après que le tribunal administratif de Strasbourg
eut jugé que la surtaxe n'était pas entachée d'irrégularité, le TGI de Metz a
finalement donné raison aux récalcitrants, observant que la surtaxe -
contrairement à la redevance - ne présente pas de caractère fiscal en
contrepartie d'un service rendu (Le Monde du 5/05/02). Boycottez Mon' Caf ! Sur l'ardoise du café Mon'Caf, place
du capitole, vient de s'afficher une nouvelle consommation: " le verre
d'eau : O,30 euro ". Eau du robinet, bien sûr . Et le comble est que c'est légal ! Le prétexte est
l'abus de certains clients ... Il semble cependant que peu de cafetiers (aucun à notre
connaissance, mais n'hésitez pas à nous les signaler) suivent l'exemple de
Mon' Caf. (La Dépêche 8/04/02). |
En 1990, la Municipalité de
Toulouse cède le service public des Eaux et de l’assainissement à La Compagnie
Générale des Eaux-Vivendi. Aussitôt, des tarifs très
préférentiels ont été accordés aux « industriels placés dans le cadre
concurrentiel », c’est-à-dire au secteur privé, avec un rabais de 40% pour
la consommation au-delà de 12000 m3 par an et de 50% pour celle au-delà de
24000 m3 par an.
Face à cette double
privatisation de l’intérêt général, un citoyen a déposé une plainte devant le
Tribunal Administratif. En 1997, la Ville de Toulouse et son associé Vivendi
ont été condamnés dans la mesure où ce tarif dérogeait au principe d’égalité
des usagers devant le service public.
Qu’à cela ne tienne.
Une nouvelle tarification, cette fois légalement conforme, voit le jour en
1999 : elle mentionne désormais seulement des tarifs en fonction de
volumes utilisés et non plus en fonction de catégories d’usagers : un
rabais de 50% est autorisé pour toute consommation supérieure à 60000m3 d’eau
par an !
Mais
c’est encore insuffisant pour calmer les appétits industriels : le 14
décembre 2001, est adoptée une nouvelle dégressivité : rabais de 50% sur
les consommations comprises entre 60000m3 et 1 000 000m3 et de 70% pour celles
au-delà.
Ce que n’a pas prévu la loi, c’est
que les discriminations entre usagers se font à coup de m3 !
Cette petite histoire
des « bonne affaires » illustre à quel point l’intérêt général est
sacrifié au profit de l’intérêt privé et privatif. L’eau est gérée sur le
modèle de rationalité de l’entreprise capitaliste selon laquelle la production-consommation en grand volume engendre des
économies d’échelle autorisant des réductions de prix.
Or
l’eau n’est pas un bien économique. Nous rappelons à ceux qui aujourd’hui se
targuent de développement durable, de J.M. Messier à la Mairie de Toulouse, que
l’eau fait partie de notre patrimoine commun, qu’elle est un bien rare et que
si la tarification doit être discriminante, c’est en sens inverse : baisse
des tarifs pour tous ceux qui l’économisent.
Note :
malgré son envoi à la presse, ce communiqué n’est jamais paru.
__________________________________________________
Préserver l’eau : une action à la source
Les techniques antipollution sont coûteuses et peu
efficaces.
L’épuration des eaux
est nécessaire, mais ne suffit pas. Pour la partie chimique de la pollution, la
seule solution réaliste est l’action à
la source. Ce principe reste difficile à faire appliquer. La volonté
politique d’intervenir réellement sur les processus industriels est faible. De
plus l’habitude de transférer les coûts du pollueur sur la collectivité est
bien établie
Dernier exemple pour
illustrer ce propos : le rapport sur la qualité de l’eau en Bretagne. La
Cour des comptes et la Chambre régionale des comptes de Bretagne ont analysé
l’ensemble des actions entreprises par l’Etat dans la lutte contre la pollution
des eaux en Bretagne. Malgré des dépenses s’élevant à 310 Millions d’euros (2
milliards de francs) depuis 1993, la qualité des eaux ne s’est pas améliorée.
La Cour des comptes
met l’accent sur la volonté politique déficiente : pauvreté des
instruments réglementaires, voire des sanctions, qui auraient dû accompagner
les financements. Elle déplore le manque de cohérence des actions engagées,
déplore le non respect du principe pollueur-payeur et jette un doute sur
l’acceptabilité économique et sociale des programmes coûteux dont l’efficacité
reste à démontrer.
Ü Réduire
l’agriculture intensive en encourageant : la réduction de l’utilisation des
pesticides et nitrates, la modération de
l’irrigation à outrance, le choix de plantations moins gourmandes en
eau.
Ü Mettre
en place des plans de communications à
destination des usagers pour encourager
des nouvelles pratiques pour économiser et préserver l’eau.
ÜMettre
en place des points de collecte pour les produits polluants (huiles usées, résidus de bricolage,
solvants, bains de photographie, plomb, piles…)
Ü Améliorer le
rendement des réseaux d’eau : en moyenne, 28 % du volume d’eau potable n’arrive pas à destination.
Charlas : Projet de barrage :ils ont
encore soif !
Le projet d'édifier une gigantesque retenue d'eau à Charlas, à une quinzaine de kilomètres au nord de Saint Gaudens, remonte à une trentaine d'années. Conçu et élaboré par le CACG (Compagnie d'Aménagement des Coteaux de Gascogne ), ce projet n'a jamais vu le jour en raison de son coût exorbitant ainsi que de l'opposition de la population et de nombre d'élus locaux. Il vient d'être relancé en février 2002 par le SMEAG ( Syndicat Mixte d'Etude et d'Aménagement de la Garonne ) avec des objectifs qui, nous dit-on, n'ont rien à voir avec ceux du projet initial centré sur l'irrigation.
De quoi s'agit-il ? Puisque Toulouse risque de manquer d'eau en été, le projet consiste à puiser dans la Garonne à hauteur de Saint Gaudens lorsque l'eau est abondante en hiver, à stocker cette eau dans un immense réservoir de 110 millions de m3 et à la relâcher en été par différents affluents du fleuve. L'ouvrage projeté n'est pas un barrage car il ne se situe pas sur un cours d'eau. L'eau, captée dans le barrage hydro-électrique d'Ausson Pointis de Rivière en amont de Saint Gaudens, serait transportée par une conduite d'environ 18 km de long, d'un diamètre de 2,5 à 2,8 mètres. Cette conduite partiellement aérienne, partiellement enterrée traverserait des villages pour atteindre le site de Charlas où, sur le territoire de cinq communes, 700 hectares de terres agricoles seraient inondés. Pour contenir l'eau, deux digues de terre seraient élevées, l'une de 50 mètres de haut, de 1,1 km. de long et de 406 mètres de large, l'autre de 20 mètres de haut, de 400 mètres de long et de 150 mètres de large. Le coût de l'opération est estimé à 1 milliard, 750 millions de francs, dont 25% pour l'adducteur servant à remplir le réservoir. |
D'après les
objectifs annoncés par le SMEAG, 75 millions de m3 devraient servir à
soutenir l'étiage de la Garonne toulousaine, 35 millions seraient utilisés
pour l'irrigation des cultures de maïs du Gers. Un simple coup d'œil sur la
carte rend peu crédible cette priorité donnée au soutien de l'étiage
toulousain. Parmi les affluents de la Garonne qui seraient alimentés par Charlas, un seul, la Louge, a
son embouchure en amont de Toulouse, à Muret. Les autres, la Save, la Gimone,
le Gers rejoignent la Garonne bien loin en aval après avoir traversé le
département du Gers. L'objectif réel semble bien être le développement de la
culture d'irrigation. C'est d'autant plus vraisemblable que la gestion de Charlas devrait être confiée à une Société privée qui
aurait, en fait, l'entière maîtrise de la distribution de l'eau. Les
conclusions d'un rapport remis en 1996 par un groupe de scientifiques
indépendants confirmaient cette hypothèse en suggérant que le projet visait
une redistribution de l'eau de la Garonne vers la Gascogne. Pour soutenir
l'étiage de la Garonne, disait ce rapport, les barrages d'EDF étaient plus
intéressants qu'un nouveau barrage. Ce
rapport ne fut jamais publié. |
Doit-on
assécher toute une région pour arroser le maïs ?
Les opposants au projet font valoir, par ailleurs, que le
captage d'eau en hiver dans la région de Saint Gaudens
provoquerait une véritable catastrophe
écologique. Dans cette région, l'eau du fleuve constitue, dans des
alluvions extrêmement perméables, une nappe aquifère qui s'étend sous la plaine
de Rivière. Cette nappe se remplit en hiver quand les eaux sont abondantes. Un
pompage dans la Garonne à cette saison empêcherait la reconstitution de la
nappe. La plaine s'assècherait de Gourdan jusqu'à
l'embouchure du Salat, ce qui entraînerait le dépérissement de l'écosystème et
compromettrait l'alimentation en eau de tout le Comminges Saint-gaudinois
et celle des collines gasconnes jusqu'au Gers. Faut-il assécher toute une
région pour alimenter en eau les cultures de maïs dans une autre région ?
Doit-on inciter l'agriculture à consommer toujours plus
d'eau ou aider les agriculteurs à gérer plus économiquement la ressource ?
Où en est-on actuellement ? L'Agence de l'eau Adour-Garonne, le CACG, le SMEA ( présidé par Mme Evelyne
Baylet, présidente de la Dépêche du Midi ), la Chambre d' Agriculture…
soutiennent le projet. Le Conseil Général de Haute Garonne et le Conseil
Régional sont réticents. Quatre des cinq communes concernées, ainsi que la
communauté de communes sont opposées au projet. La Fédération Midi-Pyrénées
des Associations d'Environnement UMINATE a déposé une demande de financement
pour la réalisation d'une étude précise sur les Alternatives à la Création de
nouveaux barRages (étude ACOR). |
La question est politique : doit-on viser une
augmentation de l'offre d'eau dans une perspective marchande ou la maîtrise
de la demande dans le respect des équilibres naturels ? Doit-on consacrer une
telle masse d'argent public pour inciter l'agriculture à consommer toujours
plus d'eau ou aider les agriculteurs à gérer plus économiquement la
ressource ?? Des débats publics organisés sous
l'égide de la Commission Nationale de Débat Public (qui permet d'amender ou
d'abandonner un projet ) doivent être organisés à
partir du mois d'octobre pendant quatre mois. Le 7 mai dernier, au cours d'une réunion organisée
à Saint-Gaudens à l'initiative d'ATTAC- Comminges, un collectif "S. EAU. S. Garonne" a été constitué. Son but est d'informer et
de mobiliser la population en vue du débat public. Eau Secours 31 a adhéré à
ce collectif. |
Ü Une réunion
publique doit avoir lieu à Saint-Gaudens le 6 juin à 21 h. à la salle du Pilat.